Le Bassin de Gap

Le socle support

Les formes larges et douces du bassin s'expliquent par la prépondérance des roches tendres des schistes et marnes noires, qui ont été facilement érodées par l'action glaciaire. Les roches dures des bandeaux lithoniques se situent en périphérie du bassin faisant apparaître les silhouettes singulières de Céüse, de Charance, de Chabrières ou encore du chapeau de Napoléon.

Les glaciers ont recouvert la quasi-totalité de la zone, tapissant, à leur retrait, la dépression de moraines et de cailloutis fluvio-glaciaires, apportant une fertilité aux sols.

L'érosion glaciaire est à l'origine de creux et de bosses, moins spectaculaires que les verrous glaciaires du Queyras et de la Haute Durance, mais qui dessinent des micro-reliefs installant des paysages spécifiques à ce bassin.

Le contexte géologique place l'unité paysagère à la croisée de la Provence et du Dauphiné : les coteaux de Céüse sont sous influence méditerranéenne tandis que Gap subit celles plus rigoureuses et humides du Dauphiné.

Le réseau hydrographique

Au creux du bassin façonné par l’érosion glaciaire, la Luye constitue l’élément principal du réseau hydrographique. Prenant sa source à la Bâtie Neuve, elle traverse Gap, reçoit les rejets de la station d’épuration de la ville, puis s’oriente au sud, creusant des gorges auxquelles elle a donné son nom et rejoint la Durance en amont de Tallard : son parcours est d’une vingtaine de kilomètres. Au confluent, elle laisse d'importants dépôts de limons, de sables et de galets ; elle est aussi souvent encombrée d’embâcles, ce qui provoque la formation de bras secondaires.

A cet axe hydrographique principal, viennent s’y greffer perpendiculairement des torrents permanents : celui du Buzon et de Bonne sur les flancs nord entre le col de Manse et Bayard, ainsi que, plus au sud, le torrent du Riotord et de Laval. Des torrents intermittents contribuent ponctuellement à la fluctuation de son débit.

La végétation

Situé au sein de la zone bioclimatique des Alpes intermédiaires delphino-provençales, le bassin de Gap subit les influences combinées d’un climat sub-méditerrannéen et montagnard tout à la fois. Sa situation de carrefour bioclimatique entraîne non seulement la présence d’espèces diverses, mais place aussi le bassin de Gap au cœur des échanges d’espèces entre différentes aires de répartition : ces corridors biologiques ont leur place dans le paysage de l’UP. Ce positionnement intermédiaire entre Dauphiné et Provence se matérialisait dans les choix des productions par village : ainsi, au début du XXe siècle, l’adret morainique situé entre La Freissinouse et La Roche-des-Arnauds (UP des Buëch) était couvert d’amandiers et de lavande fine alors que l’ubac optait pour le noyer et le tilleul.

L'urbanité

Le fond de vallée, large et plat, profite à l’urbanisation : celle de la ville de Gap mais aussi celle des villages construits sur des sites défensifs (Valserre, Saint Etienne le Laus) ou le long de voies de communication (Chorges, La Bâtie Neuve).

Les reliefs adoucis par l’érosion du glacier ont aussi été favorables à l’installation de l'homme. L'urbanisation des coteaux est marquée par un nombre important de fermes isolées, traditionnellement disper­sées pour être au plus près des lieux d'exploitation, mais aussi d'habitats individuels non agricoles : la tendance à l'essaimage du bâti se confirme.

Cependant, les versants autour de Gap, les coteaux de Céüse, la vallée de l'Avance et les vastes étendues planes des plateaux en prolongement des versants sont encore des terroirs agricoles. Espaces urbains et agricoles se côtoient et s’imbriquent offrant au regard une mosaïque mi-urbaine mi-rurale.

Les formes urbaines

Les paysages urbains se partagent entre ville, villages et habitat isolé.

L’Unité Paysagère est la seule du département où l’on trouve un centre urbain dense : celui de la ville de Gap, fondée dès l’époque romaine, sous le nom de Vappincum. Elle fut pendant longtemps une simple bourgade et ce n’est qu’à partir de la fin du XIXème siècle que Gap acquiert sa fonction et son importance actuelle.

Les caractères architecturaux

Territoire de contact entre la Provence et le Dauphiné, il est riche de ces multiples influences.

•  Tuiles en écailles au Nord du gapençais, analogues à celles du Champsaur et du Trièves.
•  Fermes de type embrunais avec leur toit à quatre pans, pour l'influence montagnarde.
•  Volume trapu, toit à double et forte pente terminé souvent par une génoise et façades en pierres sur les piedmonts de Céüse.

Hormis ces influences historiques et esthétiques décrites ci-dessus, l’Unité Paysagère de Gap a accueilli sur son sol des architectures très diverses et emblématiques d’époques récentes : habitat de la fin du XIXe (Ecoles, séminaires, La Providence, Saint-Joseph, la cathédrale de Gap), maisons des années 20-30 (route de Marseille et route d’Embrun, Nestlé), habitat lié aux grands travaux après-guerre (immeubles centre-ville, urbanisation en cité au moment de la construction de Serre-Ponçon, Super-Gap…), développement des villes dans les années 70-80 avec l’ouverture du Boulevard Pompidou et de son architecture en immeuble de plusieurs étages sans oublier les lotissements et le développement des zones commerciales dans les années 80-90.

Depuis, les nouvelles extensions se font dans un mélange d'architectures variées, dans leur forme, leur typologie et même leur couleur, véritable catalogue grandeur nature, souvent en rupture avec le vocabulaire traditionnel. Certaines s'extraient même du relief et s'installent à la force de terrassements importants. ?

Infrastructures et réseaux

La ville de Gap draine un flux de circulation très important car la ville s’est implantée à un carrefour de voies de communication :

La RN 85 relie Grenoble à Sisteron au Sud, et au-delà le pourtour méditerranéen via l'A51.
La RN 94 permet de rejoindre Briançon et l'Italie via le col de Montgenèvre.
La D994, elle permet d'accéder à l'Ouest du département, plus loin à la Drôme et la vallée du Rhône.
Par ailleurs, depuis 1988, la proximité de l'autoroute permet un accès rapide sur Marseille et Aix en Provence. Gap est aussi desservie par des lignes de bus régionales.

Ces axes routiers sont des voies à fort trafic et se comportent comme de véritables coupures urbaines pour certaines agglomérations. Ils font ressurgir des conflits d'usage entre véhicules légers et modes doux. En cœur de ville, les embouteillages aux heures de pointe révèlent un trafic proche de la saturation.Les engorgements de Gap s’expliquent d’abord par la convergence des axes de communication vers le centre-ville ; en effet, la topographie de la commune a contraint à un développement urbain en fond de vallée. Si le trafic de Gap est peu inhérent au transit (13% seulement), il est principalement lié à la circulation intra-muros (48%) ou intra-communautaire (40%). En effet, par sa position de pôle urbain, concentrant emplois, commerces, services, Gap génère un trafic continu important. A noter qu’¼ des déplacements intra-muros sont imputables aux flux domicile-travail.

L’accessibilité du Bassin de Gap est donc un enjeu à court terme. Si aucune mesure n’est prise, cela pourrait nuire au développement et à l’attractivité de la ville de Gap. En réponse à ce constat, le Plan de Déplacement Urbain, réalisé en 2003, a identifié des actions qui, pour certaines, sont effectives à ce jour : la gratuité des bus, l’augmentation de la flotte des bus, l’opération « marchons vers l’école, la création de parkings relais aux entrées de ville, l’accessibilité des personnes à mobilité réduite. Dans le cadre d’un Plan Départemental Inter Administration, le Département, la Préfecture et L’Hôpital se sont associés à la ville de Gap dans le but d’améliorer les déplacements, d’où la mise en place par exemple, de la navette express entre le site Saint-Louis du Département, excentré et le centre-Ville ; l’achat de vélos électrique. Reste le contournement urbain de Gap qui, après des années d’études, est en cours de réalisation.

Bien que l’agglomération gapençaise centralise les réseaux et les trafics, la liaison Marseille/Turin échappe à cette concentration ; elle se fait préférentiellement par la vallée de l’Avance (RD942), via Valserre puis Chorges.

En complément du trafic routier, l'unité de paysage est une des rares à être desservie par le rail. Les villes de Gap et Chorges possèdent une gare SNCF situé sur la ligne reliant Marseille et Briançon.

L’unité de paysage est parcourue par un réseau de lignes électriques aériennes Haute Tension qui marquent le territoire. Concentré à l’Est de l’UP, il converge au poste électrique de Grisolle à l’Est de la commune de Gap au hameau de Romette.

Les paysages agricoles

Les pentes, le climat, l'exposition et l'altitude ont entraîné des modes de faire-valoir agricoles différents.

Les grandes parcelles de terres labourables et de prairies du plateau de Céüse, des versants de Chabrières, et du Mont Colombis, forment un paysage très ouvert et composent une mosaïque de couleurs. Ici pas de haies, la végétation arborescente est reléguée sur les pentes raides, dans les vallons ou ravines.

Les programmes de remembrement (plateau de Céüse et vallée de l'Avance) et les travaux d’irrigation ont permis de moderniser l’agriculture : terroirs de vignes et de vergers dans la vallée de l’Avance, champs labourables et de prairies sur les versants de Charance et de Céüse.

Au Nord, sur les versants de Charance et l'adret du col de Manse, les parcelles sont de plus petite taille, s'ourlent de haies. Cependant la lecture se brouille par un épaississement des haies et une diffusion de l'habitat, révélant la forte pression que subissent ces espaces agricoles. Cette perte de lecture témoigne du "grignotage" des terres cultivées par l'urbanisation filante.

Cependant, quelques chiffres sont révélateurs d’une agriculture en difficulté : baisse de moitié de la SAU sur les 15 dernières années (de 14 486 ha à 7 624 ha) ; nombre d’exploitations agricoles fortement en baisse entre 1998 (624 exploitations) et 2010 (358 exploitations).

Les paysages de loisirs

Le Bassin de Gap en soi n’est pas une importante destination de séjours touristiques, mais plutôt un lieu de passage, où l’on se rend pour les services et commerces. Cependant, il bénéficie de l’attractivité touristique des Hautes-Alpes, destination de montagne, plus fréquentée en hiver pour ses stations de ski, avec notamment Orcières-Merlette, située dans le Champsaur à une quarantaine de kilomètres de Gap.

La fréquentation touristique est donc effective, sinon pour y dormir, au moins pour des escapades gapençaises journalières, visites culturelles ou flâneries urbaines, peut-être aussi probablement pour venir rechercher des informations sur les activités dans les environs. L'unité bénéficie également de la proximité de l’aéropôle de Gap - Tallard, véritable centre touristique pour ce qui concerne les activités aéronautiques.

Les paysages industriels

Le Bassin de Gap a été peu concernée par la révolution industrielle du 19ème siècle , demeurant enclavée malgré l’arrivée du train au début du 20éme siècle. Il est resté relativement rural jusqu’à la moitié du 20ème siècle. L’économie se développe à Gap au moment du boom démographique et de l’expansion spatiale de la ville dans les années 50, encouragée par le développement du tourisme dans les Hautes-Alpes.

Le relatif isolement géographique a vu se développer une économie endogène, sans connections fortes avec l’extérieur, à l’exception de quelques entreprises. L’économie de Gap est essentiellement une économie d’autosubsistance, en témoignent les secteurs d’activité des 8 plus grosses entreprises (de plus de 50 salariés) : hypermarchés, clinique, SNCF, EDF, entreprise de nettoyage, entreprise de transport.

Le Bassin de Gap se caractérise cependant par un tissu économique de petites entreprises stimulées par la présence de nombreuses administrations, mais aussi par la situation de Gap au centre d’une zone fortement touristique.

L’économie du bassin de Gap est dominée par le secteur tertiaire, avec notamment un technopôle, celui de Micropolis, situé dans la zone d’activité sud de Gap. Les secteurs porteurs sont : le commerce de détail, les services aux entreprises, les activités immobilières, la construction, la santé - l’action sociale, l’hôtellerie restauration. L’artisanat est tourné vers l’Agro-alimentaire (viande, charcuterie, jus de fruits, confiture de fruits, produits laitiers, glaces, pain et pâtisserie, chocolaterie confiserie, etc), le bâtiment, la production et les services.

Ces secteurs dominent non seulement l’activité économique, mais connaissent de surcroît une augmentation du nombre d’établissements, témoignant d’un certain dynamisme économique.

De ce fait, Gap et ses alentours correspondent au plus grand bassin d'emploi du département, avec une surreprésentation des professions intermédiaires et des employés au sein de la population en âge de travailler, qui a augmenté entre 2006 (38 506 individus) et 2011 (42 411 individus).

En termes d’impact paysager, le bassin de Gap ne présente donc pas d’éléments majeurs relevant du développement industriel. Le dynamisme économique est cependant lisible dans le paysage notamment par le développement de zones d’activité où s’implantent diverses entreprises.

Administrer

La position de grand carrefour sur la route des Alpes ainsi que l’éloignement des grandes métropoles, fait du bassin de Gap le centre administratif du Département avec comme noyau central, la ville de Gap, siège de l’Hôtel du Département et de la Préfecture.

Au 1^er janvier 2014, a été créée la seule Communauté d’agglomération des Hautes-Alpes : celle du Gapençais, par réunion de la ville de Gap avec Pelleautier et La Freissinouse, communes déjà membre d’une EPCI (Communauté de Communes de Tallard-Barcillonnette).

Cette « centralité administrative » peut constituer un atout dans la prise en compte du paysage dans les aménagements qui seront engagés. Cette tendance est d’ailleurs déjà perceptible au vu du Plan Paysage qui est engagé par le SCOT de l’Aire Gapençaise.

La vallée urbaine entre ville dense et urbanisation filante

Véritable dorsale le long des grands axes de circulation, cette vallée concentre l’activité humaine avec un pôle urbain, celui de la ville de Gap, et des villes-villages relais à l’Est tels : Chorges et La Bâtie-Neuve. Cet axe dynamique se prolonge, hors unité paysagère, au Sud vers la ville de Tallard et à l’Est vers Embrun.

C'est la séquence urbaine avec tout son vocabulaire d'urbanité. La ville centre s'est installée au creux de la dépression là où le relief lui offre autant de surfaces planes pour s'y développer.

C'est la séquence de la ville auréolaire qui s'étend depuis son centre aggloméré. Ses périphéries se distendent à la faveur d'un habitat individuel qui parsèment les terres autrefois agricoles, s'étalent à la faveur des zones commerciales et d'activités.

Le paysage y est donc très urbain avec son cortège d’habitat dense, de voies de circulation et d’aménagements dont de grandes zones d’activités qui se sont implantées aux entrées Est et Sud-Ouest de la ville de Gap.

Cette vallée compose une véritable limite visuelle et physique entre les deux autres structures majeures du paysage du bassin de Gap : les coteaux agricoles au Nord et les plateaux agricoles au Sud.

Les coteaux agricoles en mutation gagnés par un habitat diffus

Ils occupent les adrets des principaux reliefs qui dominent le bassin de Gap, soit de l’Est vers l’Ouest : au Nord de Chorges en direction des Parias ; au Nord de La Bâtie-Neuve en direction du Piolit et du Col de Moissière ; au Nord de Gap entre le col de Manse, le Col Bayard, et au Nord-Ouest entre la crête de Charance et les flans de la montagne de Ceüse.

C'est une véritable mutation qui s'opère sur ces terres agricoles fortement soumises à la pression urbaine de la ville centre toute proche. Quand l'agriculture redessinait les pentes de ses mosaïques de vert nées de la diversité des cultures, donnait à lire une trame parcellaire toujours respectueuse du relief, répondant à des nécessaires contraintes d'exploitation, aujourd'hui cette trame disparaît sous l'urbanisation.

Les hauteurs sauvages

A l’adret, au-delà de la zone urbanisable des coteaux agricoles grignotés par un habitat diffus, et en direction des reliefs hauts qui dominent l’unité paysagère se trouve un espace sauvage. C’est une structure paysagère discontinue qui concerne principalement d’Ouest en Est, Céüzette, Céüze, Charance, le Piolit, Les Parias, La Pousterle et le col de la Gardette.

Sur Charance, la limite basse correspond à la celle qu’a posé l’homme en construisant le canal de Gap. Cet espace, peu favorable à l’urbanisation en raison des contraintes de relief, offre la pratique d’activités sportives de pleine nature de type : escalade, randonnées, trail, VTT, vol à voile, parapente, etc.

Ces hauteurs sauvages installent les horizons de nature de la ville et rappellent sa proximité avec les grands espaces de nature.

La plaine agricole de l’Avance

Le paysage a été façonné par l’agriculture qui a tiré profit de ce large espace plane longiligne : les parcelles, rectangulaires pour la plupart, se jouxtent de manière étroite, à l’image de pièces régulières d’un patchwork. Pour desservir ces parcelles, la vallée est parcourue par un réseau de routes et chemins au croisement desquels des bâtiments se sont regroupés en hameaux. Le plus souvent agricoles accompagnés parfois de résidences principales, ils sont les témoins d'une organisation urbaine calée sur la nécessité d’habiter au plus proche de son exploitation.

Ce maillage régulier est perturbé par le cours sinueux de l’Avance qui le traverse de l’extrémité Nord-Est à Sud-Ouest. Cours d’eau de moyenne montagne, à pente faible qui prend sa source au lieu-dit « Le Foulon », draine la plaine de Chorges, et rejoint la Durance, après une vingtaine de kilomètres, au Sud de la Commune de Jarjayes. La faiblesse de ses débits d’étiage est la résultante des travaux d’assainissement agricoles anciens et des prélèvements actuels.

La rivière se devine grâce à sa ripisylve boisée, véritable corridor écologique favorisant la circulation de la faune. La couverture végétale des berges de l’Avance est effectivement dense, favorisant une eau fraiche : elle représente le principal élément de végétation de ce paysage.

Autre élément structurant de ce paysage : la route, D942, grande ligne droite traversante qui permet depuis Tallard de rejoindre Chorges et d’accéder au Nord du Département. C’est un axe très fréquenté l’hiver notamment par les touristes venant profiter des activités de neige.